Il y a des années que dans des cours, des livres techniques, ou des romans à caractère préhistorique, je défends inlassablement la théorie que l’on peut résumer par une boutade : « ce n’est pas l’homme qui a choisi le chien, c’est le loup qui a choisi l’homme. »

Ce que l’on peut formuler autrement : ce n’est pas l’homme qui a apprivoisé le loup, c’est le loup qui a apprivoisé l’homme.

Je sais bien que ma théorie contredit la Doxa officielle, ce qui m’a valu, comme on s’en doute, de gentils commentaires du genre de ceux que j’ai décrits dans un billet précédent

La Doxa officielle ? Les hommes ont capturé des loups, d’une façon ou d’une autre, et ont trouvé le moyen de les « domestiquer », par ruse ou par force, pour les utiliser. Je démontre dans les livres et les cours que j’ai cités plus haut tout ce que cette version comporte d’impossibilités : j’y renvoie avec plaisir ceux de mes lecteurs qui voudraient en savoir plus.

Non, selon moi, il n’y a jamais eu de « domestication » de quelque chien que ce soit. Mais certains loups, plutôt que de chasser eux-mêmes, avaient l’habitude (comme par exemple les hyènes aujourd’hui) de se satisfaire des carcasses et des restes d’animaux tués et mangés par des carnivores plus forts qu’eux. Et l’un de ces carnivores était… notre ancêtre.

Au début, les tribus humaines ont subi cette proximité : en fait, elles n’avaient guère d’autre choix ! Puis, elles y ont découvert un avantage inattendu : plus besoin d’enterrer ou de brûler les restes, il suffisait de les laisser aux loups qui se les disputaient d’ailleurs avec d’autres « nettoyeurs » professionnels, les vautours par exemple ! Mais peu importait aux tribus, à la fin, le ménage était fait.

Les loups nettoyeurs ont révélé d’autres talents : leur ouïe plus fine et leur extraordinaire odorat leur faisaient détecter bien plus tôt que les guetteurs de la tribu, l’approche même discrète de prédateurs hostiles. Et comme les loups n’entendaient pas se faire voler leur place, ils trouvaient le moyen de prévenir les humains d’avoir à se bouger. Quand les restes venaient à manquer, les loups les plus malins entraînaient les chasseurs de la tribu derrière eux, qui gagnaient alors un temps précieux : plus besoin de pister le gibier, en relevant difficilement des traces aléatoires, le nez des loups les menait droit au but. Là, sagement, on laissait faire les humains, car tout le monde l’a vite compris, pour les mises à mort, les flèches et autres sagaies se montraient bien plus efficaces que les crocs même les plus barbares. Finalement, les loups se sont trouvés si contents de leurs domestiques à deux pattes qu’une partie d’entre eux a pris le parti de ne plus jamais s’en séparer.

Or, figurez-vous que je viens de découvrir tout récemment un article paru sur « National Geographic », « Les chats se seraient domestiqués tout seuls (Casey Smith) », qui vient indirectement, valider ma théorie ! Indirectement, certes, parce qu’il ne s’agit pas là de loups, mais… de chats ! De savantes analyses ADN ont en effet permis de démontrer que pas plus que les chiens, les chats n’avaient été domestiqués ! Ce qui a rapproché les chats des humains, ce sont… les céréales ! Bien sûr, les chats ne goûtent pas les céréales, mais qui dit stock, même minime de céréales, dit rongeurs ! Une catastrophe pour les personnes qui stockent, mais une aubaine pour les chats, qui trouvaient là un formidable territoire de chasse, parfaitement sécurisé, un territoire exploité depuis au moins quinze mille ans par des individus parfaitement identiques à leurs parents restés en brousse ou forêt : ainsi parle l’ADN. Le chat sauvage n’a pas été domestiqué, il a choisi librement un territoire de chasse à sa convenance. Et ça, je vous le dis tout net, c’est une histoire qui me plaît plutôt bien. 

Et vous conviendrez que ce qui vaut pour les chats n’a strictement aucune raison, mais vraiment aucune, de ne pas valoir aussi pour les chiens ! Et ça aussi, ça me plaît bien : que le loup ait rejoint nos tribus, par libre choix, et parce que tel était son bon plaisir. Aucune sorte de domestication dans cette jolie histoire.

Bien sûr, j’y reviendrai, l’affaire a plus mal tourné pour les chiens que pour les chats, l’homme exerçant souvent avec un discernement discutable une pression sélective bien plus intense sur le premier que le second…

vendredi 23 novembre 2018

Nota : les romans auxquels je fais allusion (Chants libres, le Chant des cent pierres, le Chant du brasier), sont en fait une trilogie, qui raconte l’histoire d’un individu exceptionnel et extraordinaire, doué entre autres du don de savoir communiquer avec les loups, et qui toute sa vie, lutte pour sa liberté et celle de sa tribu primitive, aidé en cela par un compagnon loup, au  moins aussi exceptionnel et enragé de liberté que lui-même. Ces trois ouvrages sont disponibles (version imprimée ou numérique) dans notre librairie, ou sur Amazon.

Nous avons également publié un livret sur ce sujet :

 

 

 

 

Les différentes théories sur l’origine de la relation des hommes et des loups sont longuement étudiées et passées en revue dans notre cours de comportement.

Par ailleurs, un ouvrage (450  pages) rassemblant toutes nos études concernant le comportement est en préparation, avec une édtion (en nombre limité) prévue pour le début 2019. Réservez dès maintenant votre exemplaire, par un simple courrriel…

À ce sujet, si vous vous sentez des talents de correcteur et que le sujet vous intéresse, faites nous-le savoir (michel@audreco.com) ! En récompense, nous nous engageons à vous fournir un exemplaire de l’ouvrage finalisé, à moitié prix (pour couvrir les frais d’impression et d’expédition).

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1 commentaire

Origines du chien : que savons–nous ? Que nous dit la paléonthologie ? · 14 novembre 2019 à 0 h 06 min

[…] En conclusion, cet autre article : L’homme n’a choisi ni le chien, ni le chat, ce sont ces derniers qui ont choisi l’homme ! […]

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