Premiers contacts

Pour autant les rapports ont-ils été seulement conflictuels ?
En réalité, on le sait, les grands prédateurs acceptent plus ou moins, ou de plus ou moins bon gré, que d’autres espèces vivent, plus ou moins à leurs dépens, plus ou moins dans leur voisinage.
De telles relations ont-elles pu exister entre meutes de loups et hordes humaines ? Nous avons dit que les uns et les autres étaient adaptés aux mêmes niches écologiques, mais ce n’est pas complètement vrai.
Aucune des deux espèces ne peut vivre que de viande, fraîche ou non. Mais l’estomac du chien lui permet l’assimilation de viandes avariées, qui entraîneraient la mort pour l’homme. Plantes, fruits, l’homme les cueille, ce que ne peut faire le loup, qui pour se les procurer, dévore sans vergogne, panse, estomacs, tripes des herbivores du festin : on le voit, sur une même carcasse, on peut à la rigueur trouver à plus ou moins contenter tout le monde.
Des chasseurs cueilleurs ont-ils ainsi subi ou toléré la présence de loups charognards ? C’est bien possible, ne serait-ce parque qu’à tout prendre, ils y trouvaient peut-être aussi un certain intérêt.
Un groupe de chasseurs vient d’abattre une proie : ils sont heureux, il y aura de la viande pour toute la tribu. Mais rien n’est gagné, la mise à mort ne s’est pas faite sans bruit, et il faut désormais prendre garde à tout ce qu’il y a d’affamé qui rode dans les environs. Vite, il faut mettre la viande à l’abri de toutes ces menaces.
Les premiers sur les rangs, ce sont les loups ! Mais la tribu les tolère, pourvu que ceux-ci restent à distance raisonnable. Ce que les loups font en effet, car ils le savent, on leur laissera les morceaux qui sont pour eux de premier choix : panse et autres tripes ! Ils le savent tellement bien qu’ils sont prêts – jusqu’à un certain point, en tous cas – à défendre les humains de tous autres intrus ! Et s’ils ne peuvent défendre (le rapport de force ne leur étant pas favorable), ils peuvent en tous cas prévenir, ce qu’ils feront d’autant plus naturellement qu’ils exprimeront en réalité leur fort désappointement à se voir voler ce qu’on allait leur laisser !
Les chasseurs tolèrent d’autant mieux ces loups « commensaux », qu’ils leur trouvent d’autres utilités. La viande mise à l’abri, d’une manière ou d’une autre, on la consommera. Mais il y la question des restes. Bien entendu, les chasseurs sont nomades, mais ils ne nomadisent pas en permanence. Au contraire, ils nomadisent (on le sait aujourd’hui) à l’intérieur d’un territoire nettement délimité, allant de camps de base à d’autres camps de base, mais toujours les mêmes et demeurant dans chacun d’eux des périodes plus ou moins longues.
Mais stationner dans un camp de base, aussi longtemps que les ressources environnantes n’ont pas été exploitée par les épouses cueilleuses, nécessite… d’y faire le ménage bien régulièrement ! Des restes d’animaux dans les environs présentent bien des inconvénients et notamment celui d’attirer de grands prédateurs indésirables. Enterrer les restes, c’est certes possible, mais quelle corvée ! Les « nettoyer » jusqu’à ce qu’il n’en reste rien, rien qui puisse encore aiguiser quelque appétit que ce soit, voilà un rôle tout prêt pour nos loups !
(Extrait du cours éducateur canin comportementaliste – AUDRECO)
